Trail du Golfe du Morbihan
(233 ème Course)
Tout est dans la tête. Le physique est important, mais plus encore, avoir un mental à l’épreuve de tout est
indispensable.
Vendredi, veille du départ, nous prenons la route pour St Gildas de Rhuys. Une bonne nuit de sommeil pour
éviter le stress et être tranquille le lendemain matin. Samedi 09h30, départ vers Vannes, pour récupérer mon dossard et régler les éventuels soucis. Nous sommes arrivés au
village à 10h15, ce n'était pas encore la foule, très bien pour retirer le précieux sésame avec le numéro "2304".
Le Village :
Situé au cœur de Vannes, sur l’esplanade du port, le village de l’Ultra Marin accueille différents acteurs des courses
hors stade. Placé sous le signe de la convivialité et de l’éthique sportive, c'est un lieu idéal pour partager notre passion du sport et de la course à pied avec les visiteurs.
Espace d’échange et de découverte, réunissant à la fois les partenaires et les exposants, le village situé à proximité de la ligne d’arrivée de toutes les épreuves, sera un lieu de passage obligé pour les coureurs qui viennent tous y
retirer leur dossard. 3500 concurrents venant de divers horizons.
Le trail est une épreuve en semi auto-suffisance qui nous propose quatre
ravitaillements dont un sur la zone d’arrivée. En dehors de ces points, chaque traileur doit disposer de son autonomie alimentaire. La distance moyenne entre deux ravitaillements est
comprise entre 15 et 20 km. Il s'agit d'une course en ligne de 57 km.
Le départ est donné cette année à 14h, place de la Mairie au Bono. L'allure est libre et la barrière horaire de 12
heures. Sauf que, tenir le rythme sur 57 km n'est pas si évident qu'il y paraît ...
Vers 12h30, la navette m' emmène vers Bono. Il ne fait pas trop chaud et les discussions tournent toutes autour du même
sujet. Ce n’est pas la peine de le préciser. Me voilà arrivé. Il me reste une bonne heure avant le coup de starter. Je m'installe sur le pont pour me préparer et regarder passer
les traileurs du 177 kms. 13h50, il est temps de s’y mettre. Après m'être rangé derrière la ligne en attente du coup de départ, j'écoute les organisateurs qui nous donnent quelques
derniers conseils.
1ere étape
Bono - Larmor Baden (17,8 km)
1300 Traileurs se sont donnés rendez-vous sur la ligne de départ pour ce trail . A ce moment là, je ne sais pas encore que je vais souffrir de la chaleur. Je profite juste du moment présent, de la libération que représente ce départ après des mois de préparation, des semaines
d'entrainement, des jours de doutes et les dernières heures de stress...
Je suis parti dans le 1er tiers du peloton sur un rythme entre 9 km et 10 km/h. Cette première partie
est vraiment très agréable, il fait beau, voir chaud, mais cela reste supportable. Je garde en point de mire mes références de 2011.
Cette portion est sans doute l’une des plus belles du tracé, on est encore très lucide et l'on peut admirer le panorama que
nous offre la rivière d'Auray, avec de longues portions en mono trace, parfois un peu casse-pattes, mais magnifique. A noter, un passage bien humide lors du tour de la baie
de Kerdréen où la marée nous a obligé à salir les chaussures.
Je me sens bien, alors sans m’en rendre réellement compte, je vais accélérer et courir un peu trop vite. Ce petit excès de
vitesse allié à la chaleur qui ne cesse de monter va me coûter cher. Peu après le dixième kilomètre, ma plante de pied gauche va devenir douloureuse. Dans ces conditions, le
moral va vite baisser et l’envie d’arrêter, prendre place dans ma petite tête. J’attends le premier ravitaillement avec impatience. Au kilomètre 15, je suis arrêté par un commissaire pour le
controle de mon sac, j'en profite pour me déchausser et surtout enlever ma chevillière, qui apparemment devait être trop serrée. Une fois le contrôle terminé, je repars avec un petit
groupe, sur un rythme qui me va bien, un chouïa moins vite qu’au départ quand même. Au bout de quelques minutes, le pied semble être moins douloureux. Le moral va remonter un peu, juste
avant que ne se déclarent les problèmes de chaleur. La galère commence. A cet instant je me dis que je ne vais pas m’en sortir. Je ne peux plus accélérer, le cardio monte immédiatement à
170-180, c'est une épreuve d'endurance, il faut ralentir.
Arrivés au ravitaillement de Larmor Baden, deux de mes compagnons de route m’annoncent qu’ils arrêtent là. Bon,
moi je vais me refroidir un maximum, je vais me restaurer, boissons fraîches, yaourts, fruits
secs. Je me masse quelques minutes les pieds, puis le temps de m’étirer un peu les mollets, et de me mouiller une nouvelle fois, je repars avec mon camel plein d'eau fraiche. La pause
aura duré 15 minutes.
2ème étape
Larmor Baden - Le Moustoir (14,9 km)
Les sensations reviennent petit à petit. Le ravitaillement m’a permis de voir que j’étais pas mal physiquement. J'ai
rattrapé un concurrent de Nantes, et nous allons faire plus de la moitié de cette étape tous les deux. Nous arrivons dans l'anse de Moustran, il fait plus de trente degrés, et
pas un coin d'ombre à l'horizon, la casquette est devenue obligatoire.Pas de vent et un soleil qui nous brûle la peau,
c'est dur d'avancer dans cette fournaise. Surtout pas se déshydrater, je bois une grosse gorgée d'eau toutes les 10 minutes, mais c'est difficile, l'eau de mon camelbag est de plus en
plus chaude. Le parcours le long des plages est plat, et j'encourage mon binome de ne pas marcher. Francis est persuadé que notre "collaboration" va s'arrêter là, convaincu que je suis en meilleure forme que lui. Peut-être, mais aujourd'hui je suis en mode endurance et n'ai pas envie de l'attendre et de me griller avec cette chaleur. Pour moi tout
roule, enfin j'ai la tête qui part dans tous les sens pour essayer de trouver un peu de fraîcheur. Maintenant je sais ce que ressentent les "doudous" de mes petits enfants dans le sèche linge. En
revanche plus personne devant, et Francis qui a disparu derrière ! Dur de se motiver. J'ai imaginé être le 1er de la course, et ça a marché. Je me suis même mis à voler sur les deux derniers
kilomètres, ne sentant plus la chaleur. Une petite bosse vite avalée, tout en force et j'arrive en vue du ravitaillement. Pendant le pointage je cherchais déjà le point d'eau. Vite de l'eau de
l'eau fraîche.
Quel bonheur de s'asperger d'eau, refroidir le corps le plus rapidement possible. Je crois que j'ai bu une bouteille d'eau
gazeuse et avalé au moins deux oranges. Ensuite faire le plein d'eau du camelbag qui devient lourd et gênant, avec la couverture de survie, sifflet, téléphone pour les secours, et
les photos, les jeux de piles de rechange et la frontale, une paire de chaussettes de rechange, une bande élasto, des tubes de crème (cela s'est avéré salutaire)
mes gels, et barres énergétiques les pansements, la carte d'identité et le gobelet et maintenant un litre et demi d'eau, vous voyez pourquoi aux fils des kilomètres
ce petit sac pèse de plus en plus lourd. Après 15 minutes de repos, je décide de reprendre la route, l'étape suivante étant assez courte.
3ème étape
Le Moustoir - Kerguen ( 9,3 km)
Une fois la décision prise de repartir, il faut reconnecter le cerveau, il restait encore peut être le plus dur à faire, mais
il était nécessaire de se remotiver et se remettre dedans, la course n’était pas finie ! J'ai bu beaucoup, et je sens radicalement la différence et ça m'a fait un bien
fou ! Étais je en hypo avant le ravito ? Bonne question ! En tout cas, je retrouve mes jambes et le mental revient avec … J’enclenche la seconde, les jambes tournent bien. Je
cours à bonne allure, je double un paquet de coureurs qui marchent, je me sens bien.
Il paraît que ce qui ne tue pas rend plus fort, eh bien je vais probablement ressortir très fort alors, parce que ce sont des niveaux
de douleurs que je n'avais jamais expérimentés en course « j'entends dans la deuxième étape » et là, c'est le mystère de la course, mais depuis le dernier « ravito, »
je déroule incroyable et la confiance est revenue, une détermination farouche plein de singles, des passages sublimes, je reprends goût a scruter les alentours. Je recommence à avoir du
plaisir, donc de l'assurance. Les trailers sont des coureurs très amicaux, mais sur la fin de course, j'ai le sentiment qu'il nous reste tellement peu d'énergie que nous la consacrons
à avancer et plus à discuter avec le concurrent, que l'on double ou qui nous double.
Les kilomètres défilent et je suis à sec depuis déjà un moment, j’ai super soif mais le ravitaillement n’est plus loin. J’ai complètement décroché dans la tête, je sais que
ce n’est pas une solution mais je n’ai vraiment plus rien dans les jambes. Il fait chaud, mais je n’y pense même pas, je suis concentré sur mes appuis pour ne pas tomber. La petite descente
n’est pourtant pas technique, le chemin est large, mais comme je ne lève pas les pieds, le risque est grand de me retrouver le nez à terre ! Je double un groupe qui marche, il n’essaie même pas
de s'accrocher, je les encourage et je continue … Fou ces sensations aussi pourries !! Le son du ravitaillement, du bruit, de la musique, des encouragements, le ravito de Kerven
est là, j’espère y reprendre des forces et d’abréger mes souffrances.
4 ème étape
Kerguen - Vannes ( 15 km)
Après vingt bonnes minutes, de soins, d'hydratation et de collation, je prend la décision de remettre le couvert pour cette
dernière partie. Mathématiquement il ne reste plus que 15 kilomètres, une broutille à l'entraînement, mais j'ai presque 6 heures dans les jambes, je profite de quelques descentes pour me décontracter, je suis
heureux, ma souffrance n’est plus rien. S’en suit une longue portion de sentiers étroits alternant petites montées puis
descentes, le genre de parcours qui me plaît bien. Je suis seul, j’ai distancé le petit groupe qui était parti en même temps que moi, pourvu que ça dure. Je bois, je mange, pas envie de me retrouver dans la situation de la
mi-course. Je reste vigilant aux balisages, mais à un moment donné je prends conscience que je fais fausse route : demi tour ! La suite et fin de course ont été relativement régulières et les
kilomètres se sont enchaînés sans vraiment trop de peine (par rapport au début !). La variété des paysages, les bénévoles et supporters sur le côté, les coureurs du 177
rencontrés … autant de choses qui, à ce moment là, aident à avancer ! Mais j’ai pris trop de retard, je n’arriverai pas à faire mieux qu'en 2011 … 3km et c’est l’arrivée !
Le résultat ne sera pas brillant, mais je vais la passer cette fichue arche d’arrivée !! J’ai mal partout, des talons aux cuisses, et même au dos, mais ce n’est rien je suis heureux d’être là, et seul, avec éparpillés devant
et derrière tous ces coureurs et coureuses tous aussi fous que moi. Quand je double quelqu'un nous nous remontons le moral juste un "allez" ou "courage" pour évacuer la douleur, c’est une
communion des esprits: c’est magique.
Je dépasse des marcheurs, des épuisés, des éclopés, sans me retourner. Plus qu'un kilomètre, c'est
gagné...... Je débouche sur la dernière ligne droite, le long du port. Des spectateurs sont massés de chaque
côté et m' acclament, j'aperçois toute ma famille et Alann vient me rejoindre. Les encouragements aident à avancer mais je me sens grimacer ! Le corps humain est surprenant… je me redresse, toutes
les douleurs ont disparu pour faire place à un grand bonheur mêlé à un soupçon de fierté, sur ces derniers mètres. Le cerveau est un muscle : sa fonction, c’est de tirer le
maximum, mais toujours un peu plus, à un corps exténué. Je donne tout. La priorité, c’est de terminer les vingt pas qui restent jusqu’à l'arche final, avec à droite Alexis
et à gauche Alann qui me tirent. Dix pas, neuf pas … trois pas. Gauche, droite, gauche. (57 kilomètres). Par un ultime effort de concentration, j'essaie de sourire en franchissant
la ligne d’arrivée. Franchir la ligne comme ça, ce fut grandiose et ça a rajouté encore plus de magie à cet évènement
que je peux sans hésitation qualifier de GRAND !
Bravo à tous les concurrents, les finishers, tout comme ceux qui n'ont pas franchi la ligne d'arrivée, mais qui sont eux aussi
allés au bout d'eux mêmes pour réaliser un exploit personnel et vivre cette aventure sportive.
Merci aux 850 bénévoles pour leur soutien, leur implication dans l'organisation de l'évènement et leur présence
durant tout.
Au
départ
A l'arrivée
Départ Le Bono 14h00 Arrivée Baden 16h05 2h05 de
course
Départ Baden 16h20 Arrivée Arradon 19h11 2h51 de
course
Départ Arradon 19h31 Arrivée Vannes 22h17 2h36 de
course
Carte des pointages et controles
La boite de gâteau du sponsor
ésultats officiels : 8h17’32
soit 7h35mn de course réelle
717 ème sur 1041.
93 ème V2h sur 141.
Moyenne 8,20 km/h
soit 7'19" au kilo
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Merci d'être venu passer un moment avec moi et à la semaine prochaine pour le " Trail du Bout du Monde "
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Cardio
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